La société chinoise et sa classe moyenne.
Rapports de l’Institut des sciences
sociales de Chine :
Deux rapports de l’Institut des
sciences sociales chinois viennent d’être dévoilés : le premier porte sur
la classe moyenne chinoise, les chercheurs auraient « découvert » que
la classe moyenne en Chine représenterait 23 % de la population
urbaine ; ce chiffre se rapprochant des niveaux constatés dans les pays
développés ! De nombreuses personnes doutent de la réalité de ces
chiffres, pourtant même s’ils s’avéraient assez proche (de la réalité) dans les
villes (ce qui reste bien entendu à démontrer), ils ne prendraient en compte
que la population urbaine, or la grande majorité de la population chinoise vit
dans les campagnes ! Par conséquent, la classe moyenne est extrêmement
faible en Chine.
Le second rapport de l’Institut des
sciences sociales concerne les crimes violents commis en Chine en 2009. Ceux-ci
ont augmenté formidablement l’année dernière, brisant la situation de « relative
stabilité sociale » depuis l’année 2000. Les raisons qui expliquent ces
violences sont multiples, la principale étant toutefois liée à des raisons
d’ordre économique. Ce qui tranche avec les statistiques précédemment publiées,
c’est le caractère de plus en violent des criminels ! Le rapport montre
donc clairement « l’instabilité croissante de la société chinoise »,
car les violences, en général, n’ont fait qu’augmenter ces dix dernières années.
Réflexions du politologue Zheng
Yongnian :
Les réflexions du politologue chinois, Zheng Yongnian, sont
toujours très intéressantes, et ne versent jamais dans une admiration béate
d’une société chinoise qui vire à la dérive, bien au contraire, il analyse
cette société en toute connaissance de cause et sans langue de bois.
L’une des questions que pose ce
politologue, Zheng Yongnian, est « pourquoi les gens manifestent beaucoup
plus d’inquiétudes envers la société chinoise qu’envers d’autres sociétés » ?
Pourtant continue t-il : « la force, les moyens et la détermination
du gouvernement chinois dans le contrôle de la société, sont beaucoup plus élevés
que dans les autres pays » ; il conclut que ce qui manque à une
société chinoise de plus en plus instable, c’est l’émergence d’une classe
moyenne conséquente : « Dans n’importe quel système politique, la
classe moyenne est l’élément structurel le plus important pour une société
stable. Si une société possède une classe moyenne puissante, alors, quelle que
soit la faiblesse des autres éléments de cette société, il ne pourra pas se
produire de situations instables de grande ampleur ».
Le politologue Zheng
Yongnian poursuit : « Le sociologue-historien américain, Barrington
Moore Jr., a démontré dans son ouvrage Les
origines sociales de la dictature et de la démocratie, la logique
suivante : “ sans économie de marché, il n’y a pas de classe moyenne,
sans classe moyenne, il n’y a pas de démocratie ” » (1).
« Ce genre de développement
économique et politique est un constat qui provient des pays occidentaux
développés, où le capitalisme a permis à ces sociétés un développement
économique spectaculaire, notamment en gain de productivité, enrichissant les sociétés
occidentales, tout en permettant l’émergence d’une classe moyenne. Cependant,
le capitalisme n’apporte aucune protection à cette classe moyenne, car le seul
objectif du capital est de “ monétiser toutes les relations sociales ” !
“ S’il n’existe aucune protection sociale, s’il n’existe ni système de
santé ni système éducatif [digne de ce nom], ni de protection du travail, etc.,
la classe moyenne ne peut pas continuer à vivre ; or, le socle fondamental
pour gouverner un pays est cette classe moyenne ; par exemple, en
occident, les gouvernements alternent régulièrement, cela n’entraîne pas pour
autant d’instabilités sociales, car derrière cette stabilité se cache la
contribution de la classe moyenne ” ».
Le développement à marche forcée de
l’économie chinoise, dont le modèle économique s’inspire fortement du modèle
américain, n’a pas permis de réflexions sereines sur le véritable modèle de
société qu’elle souhaitait mettre en œuvre ; ceci peut peut-être expliquer
cela !! Le monopole du parti sur toute la structure sociale du pays
empêche toute dynamique d’innovation, toute réflexion critique, etc. ; ce système
de « pensée » est même surnommé chez certains économistes le « GDP
主义 » : GDPisme (c'est-à-dire, une focalisation sur le
P.I.B.). L’illustration de cette « pensée » s’observe davantage tous
les jours par la financiarisation progressive de l’école chinoise (de la crèche
à l’Université), l’absence de sécurité sociale (chômage, assurance maladie…),
des éléments fondamentaux pour aider à la stabilisation d’un régime politique !
Le saupoudrage et les mots lancés
ici ou là par les dirigeants chinois n’aident pas à la résolution de ces
problèmes ; il s’agit uniquement (pour le moment, en tout cas) de la « poudre
aux yeux » !!!
(1) Phrase
reprise du blog de Zheng Yongnian.
Source :
Blog de Zheng Yongnian : http://www.caogen.com/blog/Infor_detail.aspx?ID=66&articleId=19388